La colère sociale qui s’exprime en ce moment dépasse la réforme des retraites, car chacun voit concrètement des années de sa vie partir dans la machine du travail. En effet, les salaires qui stagnent malgré l’inflation, les réformes de l’assurance chômage, le projet de faire travailler 15h/semaine pour le RSA, les permis de séjour temporaires, la réforme du lycée pro sont toutes des manières de nous faire travailler plus. Une grande partie de celleux qui luttent le font pour avoir une vie en dehors du travail.
Pour pouvoir mener nos luttes, il est essentiel de sortir de la stratégie qui consiste à appeler à des journées de grèves isolées. Cette stratégie a largement démontré ses limites. Les multiples défaites depuis les fortes mobilisations de 1995 en sont la preuve, et ce malgré quelques victoires ponctuelles comme en 2019 grâce à une longue mobilisation de certains secteurs (éducation, cheminots...). Les moyens de sortir de cette impasse sont à notre portée, il est primordial d’arrêter de déléguer notre pouvoir et de laisser l’intersyndicale négocier sur la base de notre nombre. Retour ligne automatique L’heure n’est plus au dialogue, mais à l’affirmation de nos aspirations. Pour cela, le patronat et l’état ne comprennent qu’un langage : le blocage de l’appareil productif. Il faut donc que la grève soit générale et reconductible. Cela ne se fera qu’en s’organisant à la base. Après ces constats, il est tentant de vouloir se passer de l’intersyndicale, mais il ne faut pas sous-estimer son pouvoir de mobilisation, notamment pour les camarades les plus isolé·es. À nous de l’inciter à servir nos intérêts en mettant la pression depuis la base.
Un des défauts de la stratégie actuelle de la grève couplée à une manifestation est qu’elle sert principalement à faire nombre et donc à déléguer notre pouvoir d’action à l’intersyndicale. On se retrouve une masse d’individus isolés, coincée entre deux cortèges d’organisations ou syndicats sans pouvoir faire du lien. Ces défilés au rythme des fanfares et sono, en plus de nous isoler, dénaturent notre discours revendicatif et nous maintiennent dans une certaine passivité.Retour ligne automatique Pour pouvoir mobiliser des camarades durablement, il faut leur donner des perspectives, et pas uniquement celle de défiler entre Jean Jaurès et St Cyprien. En effet, la manifestation, lors de ces derniers mouvements sociaux, a pris une place de plus en plus centrale comme mode d’action, allant parfois même jusqu’à se substituer à la grève qui, en tant que travailleur·euse avec emploi, devrait être notre première arme. Il faut donc proposer des actions facilement rejoignables et/ou reproductibles qui étendent la paralysie de l’économie. Très concrètement, cela peut prendre la forme, de blocages, de tractages, d’occupation, de rassemblements, de sabotage… dans le but de s’opposer à la réforme des retraites, mais aussi à tout ce qui rend ce monde invivable.
C’est à nous, les grévistes, de nous approprier la grève, pour construire sa généralisation. Dans un contexte de sous-syndicalisation où, dans de nombreux lieux de travail, les travailleur·euse·s sont isolé·e·s car peu ou pas organisé·e·s syndicalement, la tâche est ardue mais pas impossible. Il est vital de faire preuve de volontarisme afin d’éviter ce qui a affaibli les derniers grands mouvements de grève interprofessionnelle : s’enfermer chacun·e dans nos entreprises respectives et déléguer aux seules corporations encore assez combatives (Énergie, transport, Pétrochimie) le soin de bloquer le pays.
Organiser et participer à des assemblées générales d’industries pour faire du lien entre camarades de différentes entreprises (nationale ou sous-traitante), métiers ou statuts (salarié·e ou intérimaire...) est un outil. Cela permet de sortir de l’isolement dans lequel nous maintient le travail et de se rendre compte que nous avons des intérêts communs, des intérêts de classe. C’est l’occasion d’exprimer des positions déterminées pour permettre une large mobilisation. Très concrètement, cela permet aussi de s’informer des initiatives qui ont lieu dans une branche professionnelle en prenant en compte les réalités du travail dans les entreprises, afin de créer du lien entre travailleur·euse·s.
Il est aussi incontournable de considérer l’aspect social et la nécessité de la joie dans la lutte : il nous faut proposer des moments et des lieux de rencontres comme des repas collectifs, des concerts, des projections, des lectures, des ateliers banderoles… Ce sont des moments essentiels pour apprendre à se connaître, se faire confiance, discuter, s’informer, s’organiser et que les luttes que nous mènerons soient vivantes. Pour que cette vie collective soit accessible à un maximum de monde, il faut par exemple s’occuper collectivement de la garde des enfants, de la préparation des repas et mettre en place/remplir des caisses de grève.
Tout ceci n’est possible que si nous avons du temps pour le faire et qu’on n’est pas déjà en train de penser au boulot qui reprend le lendemain. La CNT IS 31 appelle les travailleur·euse à rejoindre toutes les AG pour discuter la reconduction de la grève générale dès demain et a s’organiser dans des syndicats combatifs.
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